Une fois n'est pas coutume, après avoir mis en ligne une pièce de théâtre dont je ne sais absolument pas quoi foutre, je me suis dit, tiens, et si je mettais un pilote de série (ou intro de film, voyez ça comme vous voulez) ? J'ai écrit ça en… pfff… 2017 ? 2018 ? Je sais plus. Ça avait été optionné, puis c'était tombé dans le grand puits des projets dont un jour on a plus de nouvelles car ainsi va la vie. Donc je pose ça là, si ça peut distraire trois péquins pendant 15 minutes...
Le résumé, c'est ça : Arnold, Antoinette, Stéphane et Elisa n’ont ni le même âge ni les mêmes aspirations. Ils se connaissent à peine mais partagent quelques points communs : ils vivent dans la même barre d’immeuble abandonnée en pleine campagne et dépendent d’Internet. Arnold pour travailler, Antoinette pour chercher un emploi, Stéphane pour draguer en ligne et Elisa pour animer sa chaîne Youtube. Tous les quatre sont à la veille d’une journée très importante, qu’une catastrophe planétaire va bouleverser.
Et donc en gros ce sont quatre personnes très normales et toutes blindées de défauts qui vont devoir se retrouver à faire équipe dans un monde qui va doucement mais sûrement sombrer dans le chaos le plus total.
La mise en page est dégueulasse. J'y peux rien.
- INT. VOITURE ANTOINETTE (SMART) - JOUR
ANTOINETTE (32 ans, origine camerounaise, habillée en tailleur), nerveuse, conduit agrippée au volant de sa Smart.
Son BÉBÉ est sur le siège bébé à l’avant.
A l’arrière sont entassés STÉPHANE (25 ans, mal fagoté même si on sent qu'il a fait des efforts), ELISA (18 ans, un chouillat vulgaire) et ARNOLD (42 ans, tee-shirt tendance, veste costard, jean et grosses baskets, visiblement très stressé, il a une grosse marque de coup sur le visage genre cocard).
Devant eux est étalée une carte routière avec trois lieux entourés en rouge.
Le GPS est paumé et répète en boucle “Tournez à droite”.
Régulièrement, les passagers consultent leurs smartphones qui n'affichent aucune notification et aucun réseau.
ARNOLD (regarde par la vitre) : C’est fou ce que ça a changé, je ne reconnais rien…
STÉPHANE : Ça faisait combien de temps que vous étiez pas sorti de chez vous ?
ARNOLD : 6 ans en mars.
ELISA + STÉPHANE : Putain...
ANTOINETTE (nerveuse) : C’est toujours bon la route là ?
ARNOLD : Ben y en a qu’une, je vois pas trop comment on pourrait se tromper.
ANTOINETTE : Je sais pas moi !(le bébé se met à pleurer) Mon amour, maman n’est pas énervée après toi, elle est énervée après les gens de la voiture qui ne sont pas du tout organisés.
ELISA (un brin vexée) : Je récapitule. Antoinette, on va à votre entretien rue Marcel Dassault. Après on trace dans le centre chercher la pute russe de Stéphane...
STÉPHANE : Elle est ukrainienne !
ELISA : Ensuite on file au rendez-vous de... de... (elle regarde Arnold en cherchant son prénom)
ARNOLD : Arnold.
ELISA : Ensuite on file au rendez-vous d'Arnold juste à côté et voilà.
ARNOLD : 52 euros pour une carte routière, c’est vraiment du vol !
STÉPHANE (lisant la carte) : En plus, on n'y comprend rien. Qu'est-ce qui nous dit que le devant de la carte c'est le devant de la route ?
ANTOINETTE : Comment ça on y comprend rien ? On va dans le bon sens là au moins ?
ELISA + ARNOLD : Mais oui !
ELISA : Je vois pas trop pourquoi vous râlez pour 52 balles, vous êtes pété de fric.
ARNOLD : Je suis pas “pété de fric”, je suis juste propriétaire d’un appartement. Quand on est quarantenaire et actif, y a pas de quoi se taper le cul par terre.
ANTOINETTE : Vous dites ça pour moi ? Rapport au fait que je suis au chômage ?
ARNOLD : Mais non !
ELISA (à Arnold) : Vous êtes quand même proprio de tout le dernier étage de l'immeuble !
- INT. APPARTEMENT ARNOLD - JOUR (FLASHBACK LA VEILLE)
Un immense appartement qui occupe tout le dernier étage de l'immeuble, partiellement en travaux : des bâches, des outils de gros oeuvre sur le sol.
Sur un mur, l'agrandissement d'une couverture de magazine est affichée sous verre. Une grande photo d'Arnold dans son appartement fait la une. Titre : Arnold, la mystérieuse star de la BD.
Avec son smartphone, Arnold (qui n'a alors pas de cocard) prend en photo une pile de BD posée sur le sol et la poste à ses 74 800 followers Instagram avec la légende : "C'est parti pour les dédicaces :)"
Ding ! Notification TINDER : Pandora : "Tu as un email ;)"
Arnord va s'assoir devant son ordinateur sur l'écran duquel s'affiche son compte bancaire. Il est à - 7261 €
Il ouvre l'email de Pandora (avatar de jolie rousse à peine vingtenaire) qui lui envoie un selfie très sexy.
Il répond mécaniquement : je vois pas bien avec tous ces sous-vêtements…
Un SMS de CAROLE (avatar de jolie blonde vingtenaire) : J'ai pas envie de bosser et pas envie d'attendre ce soir, je peux venir maintenant ?
Arnold : Hélas non, là je dessine mon coeur... 21h ?
Carole : smiley triste.
Arnold : smiley triste. Je t'ai pris des Makis...
Carole : Smiley content.
Ça sonne à la porte.
Il ferme les applications de messagerie et va ouvrir.
JULIE (35 ans) très belle brune très apprêtée genre executive woman entre, avec un sac de nourriture japonaise. Elle embrasse Arnold sur la bouche et retire son manteau pendant qu'il sort deux verres et les pose sur la table.
JULIE : Quand est ce que tu déménages en ville ? J'en peux de me taper 15 bornes chaque fois que je veux te voir ! C'est sordide en plus comme quartier !
ARNOLD : Moi je m'y sens bien.
JULIE : Mais enfin c'est une foutue barre HLM ! Tu peux pas rester dans ce trou à rats ! Faut que tu sortes Arnold ! Que tu vois des gens !
ARNOLD : Il fait 250 m2, le trou à rats.
JULIE : Et pas un tiroir pour moi... En deux ans.
ARNOLD : Et des gens j'en vois tout le temps.
JULIE : Ah ouais... Sur Instagram, Facebook, Snapchat.
ARNOLD : Je suis pas sur Snapchat, j'y comprends rien.
JULIE : Ça te manque pas la vraie vie ?
Ils s'attablent.
ARNOLD : J'ai tout ce qu'il me faut ici. (un temps) Tolkien sortait jamais de chez lui, ça l'a pas empêché d'écrire le Seigneur des Anneaux.
Julie sort les aliments du sac.
JULIE : Tu m'as encore fait commander pour quatre. Je sais pas pourquoi t'insistes toujours pour que je prenne ces makis qu'on bouffe jamais..
ARNOLD (en souriant) : C'est pour mes fringales nocturnes.
Il semble hésitant, Julie s'inquiète.
JULIE : Qu'est-ce qu'il se passe ?
ARNOLD : J'aurais un truc à te demander.
JULIE : Oh chéri si tu veux que je mette des portes-jarretelles et des talons, ce soir j'ai vraiment pas la tête à...
ARNOLD (gêné) : Non... Je... Y aurait pas un contrat pour moi dans ta boite ?
JULIE : Quoi ? Le grand Arnold cesserait de snober le monde de la publicité et prêterait ses talents à l'infâme annonceur ?!
ARNOLD : Je suis broke. Les huissiers sont à ça de saisir mon appart.
JULIE : Mais comment tu peux être fauché ? Tu...
ARNOLD (la coupe): J'ai boursicoté, j'ai merdé. Et puis les travaux...
JULIE : Tes éternels putain de travaux...
ARNOLD : Bon, y a un truc ou pas ?
JULIE : Ben à vrai dire tu tombes plutôt bien... Je suis sur un brief pour un client qui t'avait réclamé sur ses deux dernières campagnes et que t'avais envoyé balader comme de la merde.
ARNOLD : C'est qui ? Coca ? BM ? Apple ?
JULIE : Tampax.
Arnold soupire.
ARNOLD : Hors de question.
JULIE : Ok. De toute façon c'était pour demain, je me suis fait planter par mon DA, t'aurais pas eu le temps. Enfin on a le concept, y a plus qu'à dessiner mais..
ARNOLD : J'accepte mais je vais pas au rendez-vous. Je propose quelques croquis, je t'envoie tout ça et c'est tout.
JULIE (prend son smartphone) : T'es sérieux, je peux leur annoncer ?
ARNOLD : Vas-y.
JULIE : La réunion est demain à 16 heures à l'agence, donc il me faut ton boulot fin de matinée au plus tard, et que tu te tiennes prêt à côté de Skype à l'heure du rendez-vous au cas où le client voudrait te parler.
ARNOLD : Deal.
Arnold jette un oeil à la pendule : 20H10. Julie le voit.
JULIE : T'as peur que je m'éternise ?
ARNOLD : Mais non enfin ! Tu sais bien que t'es ici chez toi... Mais je sais aussi comme c'est pénible pour toi de dormir ici en semaine et de te taper la galère le lendemain matin pour aller bosser. Bon, en plus j'ai une soirée de boulot à Tampaxland.
JULIE : Ok ok. Je file. Faut vraiment que je sois amoureuse pour faire 30 bornes pour bouffer trois sushis.
ARNOLD : Ce week-end je suis tout à toi.
Elle se lève et enfile son manteau.
JULIE : Au moins, je suis sûre que tu sors pas draguer en boite.
Arnold l'embrasse.
ARNOLD : Je t'aime.
JULIE : Je t'aime aussi...
Alors qu'elle se dirige vers la porte, Arnold nettoie vitesse grand V le reste de leur diner et jette leurs restes dans un sac poubelle, qu'il tend à Julie.
ARNOLD : Tu veux descendre la poubelle s'il te plait ? (Julie le fixe) C'est sur ton chemin !
Julie prend la poubelle et ouvre la porte.
ARNOLD : Tu me manques déjà mon coeur.
JULIE (essaie de cacher son sourire) : T'es trop sentimental avec les poubelles.
Ils se sourient et elle part.
- INT. VOITURE ANTOINETTE - JOUR (RETOUR PRÉSENT)
ANTOINETTE : C’est vous le type qui fout tout le temps le bordel avec ses travaux ?
ARNOLD : C’est vous la dingue qui regarde la télé à fond la nuit entre deux crises de larmes de son chiard ? (soudain tendu) Y a toujours autant de monde sur cette route ?
ANTOINETTE (sèche) : Vous pouvez continuer à pieds si ça vous plait pas.
Ils arrivent vers une rocade avec des panneaux de directions partout.
ANTOINETTE : On en est où ? Je prends sortie Sud, Est ?!
STÉPHANE : Euh… ben…
ANTOINETTE : Il faut se sortir les doigts du cul là Stéphane !
ARNOLD : Passez-moi ça… (il arrache la carte routière des mains de Stéphane)Faut prendre la prochaine à droite. Oui, là !
Antoinette pile et tourne.
Ils empruntent une bretelle et rejoignent une route vide.
STÉPHANE : C’est fou, y a pas un chat. Les gens doivent être restés chez eux à éteindre et rallumer leur box.
ELISA (s’auto persuade) : Non mais là dès qu’on va arriver en ville ça devrait être bon… Cela dit c’est cool… Je pourrais faire une vidéo sur la panne d’Internet, parce que c’est pas facile de trouver des suj...
ARNOLD (la coupe) : Si ça se trouve y a plus de réseau en ville non plus...
Grand silence dans la voiture. Ils ont tous l’air grave.
STÉPHANE (regarde par la fenêtre) : C’est marrant... Les panneaux sont à l’envers.
ANTOINETTE : Quoi ?
Une, puis deux voitures arrivent en face d’eux.
Ils se mettent tous à hurler.
ELISA : Putain c’est une quatre voies ! On est à contresens ! Frein à main, faut faire demi tour !
ANTOINETTE : Mais ta gueule toi t’as pas le permis ! T’as même pas ton bac !
ARNOLD : C’est pour ça que je sors jamais de chez moi !! Bordel on va crever !
STEPHANE : J’peux pas mourir puceau ! Ils le verront à l’autopsie !!
- INT. APPARTEMENT STEPHANE > SALON - SOIR (FLASHBACK LA VEILLE)
Stéphane vit au premier étage de l'immeuble dans un petit deux pièces en colocation avec REMY (25 ans).
Stéphane s'est aménagé un coin chambre dans le salon alors que Rémy occupe la minuscule chambre.
La copine de Rémy, CLAIRE (25 ans), met la table pour deux sur la table basse du salon, elle semble vraiment incomodée par la présence de Stéphane, qui mange des chips, plongé dans son ordinateur sur lequel il joue à un jeu vidéo en réseau.
Rémy cuisine.
CLAIRE (à Stéphane) : Et tu vas me dire que ce soir c'est le seul soir de l'année où tu sors pas ? C'est nos 6 mois, on aurait bien aimé un peu.. d'intimité... Stéph tu m'écoutes ? Tu veux pas aller faire un tour ?
STEPHANE : Non, je dois me coucher tôt pour être en forme pour demain.
RÉMY : Y a quoi demain ?
STÉPHANE : Je la rencontre.
CLAIRE : Qui ? T'as rencard avec une fille ? Tu peux te débrouiller pour que tout se passe bien et aller vivre chez elle steuplé ?
RÉMY : Non mais t'enflammes pas bébé, c'est une fille des pays de l'est rencontrée en ligne...
CLAIRE : Oh c'est un tapin ? Tu sais que la plupart du temps en fait ce sont des types qui écrivent depuis des cyber cafés en Afrique ? Lui file pas ton numéro de CB hein, manquerait plus que tu puisses plus payer ta part de loyer.
STÉPHANE : C'est pas un tapin ! C'est une gameuse !
RÉMY (moqueur) : En tout cas si c'est un tapin, elle prendra peut-être ta petite fleur...
CLAIRE : Quoi ?! Tu veux dire que.. ?!
STÉPHANE : Mais vous me gonflez merde ! Non je suis pas puceau, c'est ton débile de mec qui adore faire courir cette rumeur juste parce que je suis pas comme lui à me taper trois meufs en même temps !
Claire regarde Rémy, suspicieuse.
REMY : Il dit ça pour nous énerver, fais pas gaffe.
CLAIRE : Tu pourrais être plus sympa Stéphane, c'est pas en te comportant comme un con que tu vas perdre ta virginité.
Stéphane, excédé, quitte l'appartement avec son smartphone à la main
- EXT. IMMEUBLE - SOIR (SUITE FLASHBACK LA VEILLE)
En sortant de l'immeuble, très énervé, Stéphane bouscule Antoinette qui galère avec son porte-bébé, et ne s'excuse même pas.
Il va devant l'immeuble et regarde autour de lui : hormis cet horrible immeuble HLM et son parking, il n'y a rien que des champs autour.
Son téléphone vibre dans sa main.
C'est un message Whatsapp de BLUE EYES : You're offline ?
Stéphane : My roomate is an asshole.
Blue Eyes : I can't wait to see you tmw...
Il croise la concierge qui sort les poubelles et lui adresse un grand sourire.
- INT. VOITURE ANTOINETTE - JOUR (RETOUR PRÉSENT)
Le calme est revenu dans la voiture qui roule désormais en ville.
ANTOINETTE (très calme) : Elisa, Stéphane, je suis désolée, mes mots ont dépassé ma pensée. Je suis très tendue avec cet entretien...
ELISA : Non mais ça va…
ANTOINETTE : Nous avons tous été très vulgaires… On va faire en sorte que cela ne se reproduise plus.
ARNOLD : C’est ce GPS qui nous induit en erreur avec son “tournez à droite”.
STÉPHANE (le nez dans la carte) : Tournez à droite !
ARNOLD : Ça va maintenant ! C’était pas de ma faute !
STÉPHANE : Mais non, la rue Dassault, c’est là, à droite !
Antoinette tourne et se gare dans la rue.
ARNOLD : Bon ben voilà, mission 1 accomplie.
- EXT. RUE - JOUR
Ils sortent tous de la voiture sauf Arnold.
ARNOLD : Je reste là, y a trop de monde pour moi dehors.
Les autres regardent à gauche et à droite : la rue est vide.
ELISA (à Antoinette) : Il faudrait que vous vous détendiez un peu sinon vous allez faire flipper la recruteuse...
Une FEMME d'une petite trentaine d'années sort en panique d’un immeuble et court vers le groupe.
FEMME : Vous avez Internet vous ? Vous avez du réseau ?!
STÉPHANE : Non...
FEMME : Mon dieu mais comment est-ce qu’on va faire ?!
La femme repart, se ravise, revient vers le groupe.
FEMME : Vous savez combien de temps c'est pour cuire des oeufs à la coque ? J'avais promis à mon fils de lui faire des oeufs à la coque ce matin..
Tous ont le réflexe de poser la main sur la poche dans laquelle se trouve leur smartphone avant de se souvenir que ce dernier ne leur sera utile en rien.
ELISA : Euh.. En tout cas c'est moins de dix minutes.
STEPHANE : Moi je dirais une ou deux.
ARNOLD : Non, c'est clairement plus de 5.
FEMME (l'air perdu) : D'accord... D'accord.
Et elle part.
Tous se regardent, super angoissés. Ils réalisent que la panne est globale.
ARNOLD (depuis la voiture)) : Non mais ça va forcément revenir dans la journée...
STÉPHANE : C'est pas juste une panne d'Internet, c'est une panne de tous les réseaux, on dirait que les satellites ont crashé.
Personne ne répond.
ELISA (toussote pour rompre le malaise) : Alors Antoinette, prête ?
ANTOINETTE (très angoissée) : Euh oui… Trois qualités : j’aime le travail en équipe, je ne compte pas mes heures et je suis dynamique. Trois défauts : perfectionniste, ambitieuse et… Et… Merde, c’est quoi déjà putain le troisième ?!
STÉPHANE : Vous couchez avec les patrons mariés ?
ANTOINETTE : Petit con !
ELISA : Vous pouvez dire “trop spontanée.”
ANTOINETTE : Comment vous savez ça d’abord ?!
STÉPHANE : J’ai tapé les noms de tous les habitants de l’immeuble dans Google un dimanche soir où je me faisais chier. Dites donc sa femme elle vous en veut hein ! Et elle est bonne en référencement...
ARNOLD (depuis la voiture) : Mais enfin ça se fait pas ! Cela dit moi vous pouvez y aller... Vous trouverez surtout des articles élogieux, notamment un de Télérama d'avril 2012...
ANTOINETTE : Ils savent chez Télérama que vous vous tapez deux femmes en même temps ?
ARNOLD : N'importe quoi ! Je ne vous permets pas !
ANTOINETTE : Ah bah pardon mais les allées et venus sont pas très discrètes... D'ailleurs, si vous pouviez leur demander d'enlever leurs talons, parce qu'avec le plancher ça réveille le petit...
ARNOLD : Il dort jamais votre gosse !
ANTOINETTE : A cause de vos putes en talons de plomb !
ELISA : Antoinette je crois qu'il faudrait que vous vous concentriez sur votre entretien...
ANTOINETTE : Oui.. Mon entretien... (à Stéphane) Et c’était pas la peine d’être si agressif…
STÉPHANE : Je suis désolé, je sais pas ce qui m’a pris de dire ça. Et puis coucher avec des gens mariés, c’est peut-être plus une qualité qu'un défaut. Au moins vous couchez…
ANTOINETTE : Je ne savais PAS qu’il était marié !
STÉPHANE. : Bref, je vous demande pardon. J’suis hyper à cran, il me faut absolument Internet...
ELISA : Tire un coup, ça ira mieux !
STÉPHANE (rougit) : J’ai dit ça comme ça juste parce que j’allais mourir….
ANTOINETTE (jette un oeil à l’heure) : Bon, il faut que j’y aille.
ARNOLD (à l'intérieur de la voiture, baisse une vitre) : Y a un problème avec le bébé là ! Y a une odeur ! Une grosse odeur !
ANTOINETTE : Les couches sont dans le coffre !
Elle s'engouffre dans le bâtiment.
ARNOLD : C’est quoi cette histoire de patron marié ?
STÉPHANE : C’est le père de son gosse…. Elle s'est fait slutshamer par sa rombière sur Internet, c'est moche...
ARNOLD : Slut quoi ?
ELISA : Enfin père c’est un bien grand mot. C’est le type qui l’a fécondée.
STÉPHANE : Ah, tu vois, toi aussi tu fouines sur les gens sur Internet.
ELISA : Non, ma mère travaille dans l’immeuble.
ARNOLD : Elle est freelance elle aussi ? Dans quoi ? RP ? Pub ? Com ?
ELISA : Non elle s'occupe de l'immeuble !
ARNOLD : Ah mais vous êtes la fille de la concierge ?
ELISA : Gardienne.
- INT. LOGE GARDIENNE IMMEUBLE - SOIR (FLASHBACK LA VEILLE)
Dans le minuscule salon/cuisine, la CONCIERGE (45 ans) fait la vaisselle du dîner alors que sa fille Elisa est assise plongée dans son smartphone.
CONCIERGE : T'es même pas sortie de la journée alors qu'il a fait un temps magnifique !
ELISA : Je croyais que j'avais plus le droit de sortir !
CONCIERGE : Plus le droit de sortir le SOIR ! Mais l'après-midi tu dois voir des jeunes de ton âge !
ELISA : Mais maman, ce sont des gamins !
CONCIERGE : T'avais qu'à pas redoubler !
ELISA : Plus de sorties, plus d'Internet ! Et en plus tu vas m'en parler tous les jours ?!
Elisa rentre dans sa chambre, furieuse.
- INT. LOGE GARDIENNE > CHAMBRE ELISA - JOUR (SUITE FLASHBACK)
Elisa s'assoit au bureau de sa minuscule chambre.
CONCIERGE OFF : Tous les jours jusqu'à ce que tu aies ton bac ! (un temps)Et pas de garçons non plus!
ELISA (marmonne) : Ah bah ça ça va pas être compliqué...
La concierge entre dans la chambre d'Elisa, un livre à la main.
CONCIERGE (entre avec précaution) : Tiens, je t'ai acheté un livre.
ELISA (prend le livre) : Merci Maman...
Elisa pose "le Deuxième Sexe", de Simone de Beauvoir sur une pile de livres féministes à côté de son bureau.
CONCIEGE : Et ne reste pas toute seule Elisa ! Fais-toi de nouveaux amis !
ELISA : C'est facile dans ce trou paumé !
La concierge sort en fermant la porte derrière elle.
Immédiatement, Elisa saute sur son lit et sort de sous son oreiller un ordinateur.
Elle l'ouvre sur sa page Youtube "ELISLIFE". Elle a 108 000 abonnés qui suivent fidèlement chacune de ses nouvelles vidéo dont on aperçoit les vignettes. Sur Twitter, Elisa a 37 nouvelles notifications (majoritairement des internautes qui disent qu'ils n'en peuvent plus d'attendre sa vidéo hebdomadaire du lendemain).
Elisa se cale dans son lit, sourit et les lit.
- EXT. IMMEUBLE - SOIR (SUITE FLASHBACK)
La concierge balaye le passage devant l'entrée.
Antoinette sort son bébé de sa Smart et arrive tout sourire.
CONCIERGE : Il ne pleure jamais ce petit coeur ! Ma fille c'était crise de larmes sur crise de larmes !
ANTOINETTE : Elle va bien ?
CONCIERGE (fière) :Oui ! Impossible de la sortir de sa chambre et de ses révisions ! Dites donc vous avez l'air en forme !
ANTOINETTE : Oui, j'ai enfin décroché un entretien pour un job demain !
CONCIERGE : Je croise les doigts pour vous !
Antoinette galère à pousser la porte pour entrer dans la hall de l'immeuble avec son porte bébé. Elle est bousculée par Stéphane, qui sort et qui ne s'excuse pas. Puis elle est doublée par Julie qui s'engouffre dans l'immeuble avec un sac de nourriture japonaise et disparait sans lui tenir la porte.
Stéphane passe devant la concierge, très énervé.
La concierge emmène les poubelles vers le parking.
Stéphane s'arrête et échange quelques messages sur son téléphone, son visage s'illumine.
CONCIERGE : Et bah vous aussi vous semblez passer une bonne journée !
STEPHANE : Demain... Demain sera formidable !
SUITE FLASHBACK, MAIS PLUS TARD, à 23H59
- INT. APPARTEMENT ANTOINETTE - NUIT
Antoinette regarde son bébé dormir, attendrie. Puis elle tend l'oreille, semble devenir anxieuse et s'approche du bébé qui dort en écoutant attentivement.
Elle se redresse, sort son smartphone (qui indique 23h59), et tape dans Google : "son normal bébé qui dort".
Puis Antoinette hésite et finalement, tape son nom dans Google.
Les résultats s'affichent : des insultes, un site dédié à la jeune femme qui se serait tapée un homme marié, des photos de nus d'elle.
Antoinette éteint brusquement son smartphone.
- INT. APPARTEMENT STÉPHANE > SALON - NUIT
On entend des gémissements et autres râles de Rémy et Claire depuis la chambre.
Stéphane consulte le site d'un bel hôtel en ville dans lequel il a réservé une chambre.
Il prend son smartphone (qui indique 23h59) et ouvre Whatsapp pour reprendre sa conversation avec Blue Eyes.
Stéphane : I booked an hotel..
Blue Eyes : don't tell me, I want the surprise...
Stéphane : OK...
Blue Eyes : I call you as soon as I arrive, ok ?
Stéphane : ok babe.
Blues Eyes : see U tmw IRL my love...
Et Blue eyes envoie une photo de ses seins avec un émoticon coeur.
Stéphane est amoureux comme jamais.
Du coup il se rend sur un site de porno.
- INT. APPARTEMENT CONCIERGE > CHAMBRE ELISA - NUIT
Elisa est en pyjama dans son lit, avec son ordinateur portable sur les genoux (qui indique 23h59).
CONCIERGE OFF (depuis le salon) : Et plus d'écrans jusqu'à demain ! Mais tu peux lire ton livre si tu veux.
ELISA : Bonne nuit maman !
CONCIERGE OFF : Bonne nuit ma princesse.
Elisa esquisse un sourire.
Elisa ouvre Facebook, elle a reçu un message de KARINA:
"Salut ma Zazou, tu me manques terriblement, j'aurais tellement voulu vivre tout ça avec toi, comme on avait dit. Finalement je ne repasserai pas le week-end prochain, je dois aller chez Ikea. Je t'embrasse fort. K. "
Elisa, un peu tristounette, ferme Facebook et va sur Youtube pour lancer le chargement de sa vidéo du lendemain. Temps de chargement, 1h20.
Elisa pose l'ordinateur toujours ouvert sur sa table de chevet, elle prend le livre que lui a offert sa mère, l'ouvre et le plie pour lui donner de l'usure, puis pose un marque page vers la page 60. Elle se ravise et le met plutôt page 35. Elle repose le livre en évidence.
Elle éteint la lumière, et s'endort face à la lumière de l'écran de l'ordinateur.
- INT. APPARTEMENT ARNOLD - NUIT
Face à son ordinateur (qui indique 23h59) Arnold a fini les croquis sur sa tablette graphique, il regarde en soupirant les dessins ridicules de Tampax qui parlent entre eux.
ARNOLD : C'est vraiment débile ce truc de sang bleu...
Pas de réponse, il se retourne, CAROLE (28 ans jolie blonde, Louboutin au pieds) s'est endormie sur le canapé.
Arnold lance le chargement de ces fichiers très lourds vers un serveur de l'agence de pub. Temps de chargement : 7 minutes.
Il reçoit un message Tinder de Pandora : "Je me caresse en pensant à toi."
Il soupire et ne répond pas.
Dans chaque appartement les pendules passent de 23h59 à 00h00
Chez Antoinette, endormie devant une série Netflix, l'image de l'Ipad se fige et un message apparait : VEUILLEZ VÉRIFIER VOTRE CONNEXION INTERNET.
Chez Stéphane, le film porno est arrêté sur "Buffering 83%." En panique, il clique partout en répétant "non non non !"
Chez Elisa, le chargement de la vidéo Youtube est suspendu. Mais elle dort comme un bébé
Chez Arnold, le chargement des dessins s'est interrompu, mais il est occupé à embrasser Carole.
- EXT. RUE - JOUR (RETOUR PRÉSENT)
Elisa et Stéphane changent la couche du bébé avec difficultés à même le trottoir.
Arnold essaie de respirer, mais il fait une crise de panique.
Stéphane jette un oeil sur son smartphone.
Les deux autres le scruptent.
ARNOLD : Toujours rien ?
STÉPHANE : Toujours rien...
FIN EPISODE 1 (ou intro du film, j'en sais rien moi, laissez moi tranquille)
Voilà... Ensuite le chaos va se généraliser. Plus d'électricité, d'eau courante, de fioul. Supermarchés vandalisés, guerillas urbaines et tout le tintouin... Il n'y a plus d'autre moyen d'information que le bouche à oreille, et les rumeurs vont bon train. Tempête solaire, attaque des russes, etc. Et finalement, cette équipe pourrie qui ne s'entend jamais sur rien va retourner dans sa barre HLM plantée au milieu de nulle part.
Nos quatre “héros” vont donc devoir faire équipe avec leurs autres voisins. Beaucoup sont pour eux des inconnus, quelques uns s'avéreront être des ennemis… Stéphane a désormais Blue Eyes sur les bras (en plus de son coloc et de sa meuf chiante), Antoinette et Arnold débutent une histoire d’amour dans un contexte très propice à l’engueulade (surtout quand les deux meufs d'Arnold débarqueront) et Elisa a sa mère sur le dos du matin au soir (Sa mère qui trouve que cette situation apocalyptique n'est pas une raison suffisante pour ne pas réviser son bac) et en plus elle n'arrive pas à joindre sa copine dont elle est amoureuse histoire de pouvoir partager ses sentiments avant de mourir.
Chacun tente comme il peut de réveiller le survivaliste qui est en lui, mais les compétences sont plutôt… théoriques.
Antoinette a vu l’intégralité de The Walking dead, tous les documentaires sur le survivalisme et toutes les saisons de Koh Lanta, Arnold, en grand fan des émissions de Bear Grylls envisage de se nourrir de “ce qu’offre la nature” et va se lancer dans un potager et l’élevage de quelques animaux de ferme volés non sans difficultés dans une ferme non loin, et se mettre au cheval (il a également vu toutes les saisons de Koh Lanta mais il préférerait crever que de l’avouer), Stéphane s’y connait un peu en stratégie de combat et en sécurisation d’un lieu grâce aux jeux vidéos… Et Elisa… Et bien Elisa elle ne fout pas grand chose mais elle filme (elle a trouvé des batteries portables qui pourrait être bien plus utiles à autre chose mais bon… la génération Z...
La vie s’organise. Un système de vote et de rationnement fonctionne à peu près. La cour de l’immeuble ressemble de plus en plus à une ferme. Certains aménagent des bunkers dans les caves, au cas où. D’autres préfèrent fabriquer des cellules pour enfermer les ennemis potentiels. Certains sont persuadés qu’ils vont mourir. Y a même une secte qui se crée... Et puis la plupart des voisins apprennent à combattre comme ils peuvent. Ils se préparent à une attaque.
Parce qu’en effet, si la menace n’est pas vraiment concrète, la parano va bon train. Des tensions apparaissent, le système de vote montre des failles, et plusieurs clans vont se créer. Il y aura des alliances, des espions, des trahisons. Nos quatre voisins seront au coeur des intrigues. Parfois séparés par certaines décisions, ils finiront par se retrouver.
Finalement, le plus dur ne sera ni de se nourrir, ni de vivre sans papier toilettes, ni de craindre la fin du monde, ni d'abattre la poule naine, mais bien de cohabiter.
Le format n'est pas facile à lire, mais c'est vraiment génial ! Le postulat de départ est en lui-même une superbe trouvaille
Rédigé par : Isaac | dimanche 29 janvier 2023 à 21:49